En 1222, Mariam de Sebastia, princesse arménienne, est en peine : le deuil de ses filles, mortes en bas âge, lui est impossible. C'est ce que rapporte un scribe, évoquant dans un colophon cette famille frappée par le destin. Deux cents ans plus tard, bien loin de là, un petit noble savoyard, Antoine d'Arloz, décide dans son testament de se faire enterrer dans le choeur de l'église de Leyment, « du côté du vent, au lieu où est situé le banc de son épouse ».. Ces témoignages d'affection pour l'autre moitié ou pour les enfants sont saisissants et renvoient à différentes conceptions sensibles de la famille au Moyen Âge. Des modèles très englobants se dessinent, ménageant de larges parts aux enfants, aux frères et aux soeurs quand d'autres représentations médiévales préfèrent l'image resserrée du couple. Et pourtant, quand un bourgeois bien établi cherche à obtenir une lettre de légitimation pour ses enfants bâtards, il médiatise une situation jugée anormale etentend replacer juridiquement sa progéniture dans le jeu des successions. C'est dire si la famille est un corps vivant qui se définit et se remodèle sans cesse, notamment à la faveur de l'irruption de nouveaux membres mais surtout en fonction des normes qu'elle suit ou, en l'occurrence, qu'elle participe à façonner par ses transgressions et/ou ses interprétations.. Cette richesse est illustrée par le présent ouvrage, fruit de journées d'étude des doctorantes et doctorants du CIHAM. De la péninsule ibérique au Caucase, le volume confronte des aires géographiques, des acteurs sociaux et des sources très variés couvrant un long Moyen Âge du VI^e au XV^e siècle..